Petits poèmes de Nuits - suite -

 

eau

silence

nostalgie

insomnies

 Papillon 

 

Suis-je lac ou geyser ?

 

eau lisse

miroir silencieux

respiration légère

juste une ondulation

eau profonde

qui repose, lourde,

abandonnée,

au creux de terre...

geyser, jaillissante eau

bouillonnante

bondissante

chantante

surgissant des tréfonds

impérieux

chaude

explosion

eau

O

goutte ronde

ventrue

rebondie

lisse

transparente

goutte de rosée

goutte de pluie

goûte !

goutte bue

toujours renaissante,

rosée, pluie, larme...

eau première

jamais tarie

où éclot

ronde;

rebondie,

lisse et ventrue :

la vie.

en silence

sans prétention

sans éclaboussement aucun

dans la profondeur lourde,

sans trouble ni agitation,

sans éclaboussure,

 

eclot

l'immense, l'énorme,

l'impérieux

jaillissement :

la vie.

eau

O

immobile bouillonnement

mouvant équilibre

qui se précipite ou qui repose

eau vive

eau dormante

la même, pourtant

source imperceptible

vaste océan

eau

toujours elle-même

et qui ne se perd jamais en route

tout en inventant mille chemins

(mille c'est bien peu dire)

eau qui prend tous les chemins

qui se présentent,

qui est de toutes les éclosions

qui est de tous les renouvellements

de toutes les germinations

de toute vie

et qui jamais ne se perd

sage ou folle

silencieuse ou tonnante,

elle est.

elle est.

mais jamais totalement révélée

dans ce qu'elle paraît

toujours autre

toujours ailleurs

on ne peut se contenter de la voir

il faut encore l'imaginer

car la cascade ne dit pas le lac

et le lac ne dit pas le geyser

et le ruisseau ne dit pas la pluie

et que dit la larme ?

 

larme

O

larme !

goutte d'eau

signe de vie émue.

univers qui ne dit ni le lac

ni la cascade

ni le geyser

ni la pluie

ni la source

ni l'océan

eau signe

de ce qui est au-delà des apparences

signe de naissance

signe de vie

et de renouvellement

signe d'unité dans les foisonnements

fous

signe de foisonnement dans l'immobilité

sereine

signe d'émotion

 

eau

miroir d'univers

 

je suis lac et geyser

et bien plus encore

je suis eau

miroir d'univers

signe...

avril 1982

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Silence

page blanche ?

oreille attentive

au son ténu

que les mots recouvrent

tout remplis qu'ils sont

d'eux-mêmes

 

silence

si...

...lance

note suspendue

point d'orgue

attente

frémissement

 

si lence

si lance...

a condition

que se taisent les mots

qu'attentive soit l'oreille

 

a condition

que s'apaise toute agitation

que seule

la vie soit

que seule, la vie, s'y lance.

 

rythme

pulsation

mélodie

silencieuse musique ?

 

mais il faut se taire

comme pour nager il faut

quitter le sol

 

inquiétant

difficile

mais désirable silence.

avril 1982                                          

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Nostalgie

de tout ce qui n'est pas

et qui aurait pu être

aurait pu

peut-être

 

peut-être...

dans ce que je vis

dans ce qui est

je sens l'adieu

adieu à ce qui n'est plus

a ce qui n'a pu être

et ne sera jamais.

possible écarté,

mort avant de naître.

 

peut-être...

il aurait pu être

une fois

une autre histoire

d'amour bien sûr,

d'amour.

 

mais ce qui est aujourd'hui

n'y aurait pas survécu

et je verserais une larme nostalgique

sur un possible mort-né

même pas imaginable...

 

l'improbable entre tous les possibles,

celui qui s'incarne, ici,

maintenant,

il est

riche d'être,

riche des harmoniques

nostalgiques

de ce qui n'est ni ne sera...

 

il est, une fois,

aujourd'hui, une histoire

d'amour, bien sûr,

d'amour

 

paisible

et nostalgique

passion contenue

et détachement

 

il est, aujourd'hui,

une histoire

où tout es donné

où rien n'est donné,

une histoire

sans acquisitions

mais non sans traces

 

une histoire

folle

de sagesse

une sage histoire

de folie

je ne sais trop si c'est la folie qui est contenue

ou la sagesse...

l'hisoire le dira

peut-être ?

 

peut-être...

plusieurs histoires

s'entrecroisent

en moi

plusieurs histoires

d'amour

mais ça n'en fait qu'une

au bout du compte

car mon amour et moi ne faisons qu'un

rêvant d'une improbable coïncidence

avec un autre et son amour

improbable...

 

alors j'aime, d'un amour

où se peignent les nuances variées

de la souffrance et du plaisir,

du désir toujours insatisfait,

toujours douloureusement

manquant,

 

que j'aime, pourtant,

que j'aime...

et mes histoires sont belles,

je n'en finis pas de les écrire

je les dis

je les chante

je les contemple

je les transfigure

je les démultiplie

 

et encore,

je pleure intérieurement

sur  celles qui n'ont pu être,

sur celles que j'aurais voulu vivre

et que je n'ai pas su réaliser

(le voulais-je vraiment ?)

toute limite tranche dans le vif

et ça saigne longtemps

et ensuite il faut que ça se cicatrise

longtemps encore.

quant à la cicatrice,

elle reste là

elle est.

indélébile,

alimentant une nostalgie

sans fin

sans fond

sans limites

toujours présente

au creux du présent

le plus serein

le plus heureux,

le plus enthousiaste.

 

l'océan salé

des larmes de jadis

et de toujours

est toujours là, au fond de tout,

témoin de l'amour blessé

par tout ce qui n'a pu être

et qui aurait pu...

peut-être...

mai 1986

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Insomnies

O toi

le sommeil qui fuit

qui s'échappe

et me glisse des yeux,

moqueur...

 

O toi, nuit blanche

comme une page vierge

où s'inscrivent

et se dessinent

en arabesques folles

mes fantasmes

 

O toi l'insomnie

familière,

compagne de ma bulle,

secret laboratoire

où d'une mystérieuse alchimie

emerge mon désir,

 

je te connais bien

je te pratique depuis longtemps

tu surgis,

imprévue, capricieuse,

impérieuse,

sans égard pour mon goût

de la tranquillité.

et tu insistes.

 

jadis tu me faisais très peur,

c'était même la panique !

mais j'ai appris à te découvrir

et même à t'apprécier.

j'ai exploré avec toi

mes cavernes d'Ali Baba

et traqué les quarante  voleurs...

j'ai attendu le Prince Charmant

(version revue et corrigée)

Petit Poucet, j'ai semé

mes repères

et démasqué mes  chemins

qui tournaient fâcheusement en rond.

Petit Chaperon Rouge connaissant bien l'histoire,

je m'y suis mise à l'abri

des dévorantes surprises...

Mais la Belle au Bois Dormant

ce n'était sûrement pas moi !

 

je suis plutôt vigile au coeur de la nuit

pont entre deux mondes,

navire ne sachant s'il va, ou non, appareiller,

conscience qui ne peut se décider à se laisser sombrer.

 

O nuit sans sommeil,

creux obscur de la vague,

ciel étoilé dans le grand silence,

clapotis de l'eau noire et tiède,

chuchotement de soi à soi,

tapisserie de points d'interrogation,

célébrations secrètes,

gestation d'orfèvre,

oscillation

entre la peur de mourir

et l'enchantement de naître...

 

O nuit exigeante

qui ne me fait pas de cadeaux,

sauf ceux que je n'attendais pas,

tes sédiments s'accumulent

Qu'en ferai-je ?

 

tu es fin et commencement

tu es adieu et promesse

tu es le vide

tu es l'absence

tu es le silence

O solitude

juin 1986

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Papillon

Eclair bleu

lové dans sa silencieuse alchimie

promesse d'arc-en-ciel

ailes

respiration splendide

battant sur l'infini,

si petites, si immenses

rêveuses

parfaites

battement silencieux,

coeur de l'univers

si vaste, si petit

éclair vivant

coeur lumière

éphémère,

mère-veille

veilleuse d'éternité

jamais éteinte ...

si l'on y veille...

mai 2005 

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